Ce sont, pour l'instant, des annonces. Produire, exclusivement, des véhicules électriques. Les constructeurs l'affirment, en tout cas pour l'Europe. L’un des plus grands, Toyota (qui flirte souvent avec la première place en volume mondial), a exprimé quelques bémols. Le patron de sa division scientifique et de son institut de recherche, Gill Pratt relativise le bel optimisme d'un parc exempt d'émissions de CO2 sur la route. Il l'a dit au Forum de Davos, et l'a répété à Tokyo. La science contredit ces espoirs.
La question des métaux
«Malgré les efforts pour se fournir en lithium, nécessaire aux batteries, ce métal ne pourra pas être extrait en suffisance. D'ailleurs, les documents qui prédisent un avenir sans moteur à explosion comportent un astérisque qui renvoie à une phrase disant: pour autant que les conditions le permettent», précise Gill Pratt. «La conversion du parc est un rêve. Le lithium n'est pas assez abondant ni le nickel et le manganèse, et l'infrastructure de recharge ne suit pas. Dans ces conditions, il est irresponsable de se concentrer sur une seule manière d'entraîner les voitures», ajoute-t-il. Toyota annonce aussi un gros programme électrique, mais continue dans ce qui constitue sa force, les hybrides et les hybrides rechargeables.
Ce credo est partagé, notamment, par Hyundai. Toyota prévoit de vendre 5,5 millions de ces voitures en 2030, soit plus de la moitié de son volume. Gill Pratt s'exprime dans Automotive News: «Je pense que ce dont nous avons le plus besoin, c'est d'un peu plus de franchise de la part des équipementiers, tant vis-à-vis du public que des décideurs politiques.» Autrement dit, la «religion» des voitures fonctionnant uniquement à l'électricité ne saurait être suivie aveuglément.
Pratt fait le calcul suivant: imaginons 100 autos émettant en moyenne 250 g/km de CO2 (très américain comme moyenne!). Avec la restriction du lithium, vous ne pourriez avoir qu'une seule voiture tout électrique avec une grosse batterie de 100 kWh, réduisant la moyenne à 248,5 g/km. Avec la même quantité de lithium dans des hybrides avec leurs petites batteries, cela reviendrait à fournir le précieux métal à 90 voitures (1,1 kWh), 10 restant avec un moteur thermique, la moyenne passant alors à 205 g/km (-20%).
Le scientifique ajoute qu'avec sa Tesla de 100 kWh, sa femme roule 45 km par jour, soit 10% de l'autonomie et que c'est un énorme gaspillage de poids et de capacité. Bref, les hybrides pourraient bien constituer une solution pour abaisser rapidement les émissions de dioxyde de carbone. En embuscade, l'hydrogène, que Toyota, Hyundai et beaucoup d'autres savent déjà utiliser.