Je ne sais pas vous, mais, quand on m’interdit quelque chose sans raison ou qu’on le bannit sans mot dire, cela a tendance dans le meilleur des cas à attiser ma curiosité, au pire, à fortement m’agacer… J’ai lu les «Dix petits nègres» d’Agatha Christie sans y voir autre chose que la référence à la comptine morbide qui rythme ce palpitant récit. J’ai écouté «Carmen» tout en continuant à condamner la violence faite aux femmes. J’ai vu «Autant en emporte le vent» sans développer une vision romancée et idéaliste du Sud esclavagiste. Et je lis «Le Petit Nicolas» à mon fils en lui précisant que l’image de la mère du garçonnet occupée à cuisiner et à repasser les chemises tandis que le père se la coule douce sur le canapé est rétrograde.
Bref: on explique, on remet dans le contexte de l’époque et on avance! Voilà pourquoi, j’ai beau retourner la question encore et encore, je n’arrive pas à être d’accord avec les tenants de la «cancel culture». Il me semble que c’est en ouvrant les yeux sur les erreurs du passé que l’on prépare un meilleur avenir. Que c’est en décryptant et exposant à la lumière des projecteurs les zones d’ombres que l’on évite de tomber dans les mêmes écueils. Idem concernant ces figures historiques qui aujourd’hui dérangent. Ne vaut-il pas mieux les regarder en face, droit dans la rétine pour affronter notre côté obscur plutôt que de se bander les yeux et de se pincer le nez?