La France, c’est nous

SOLIDARITé • Il aura fallu les tragédies de Paris pour que s’érige un paradoxe: au moment où les frontières, tout naturellement, resurgissent, comme éléments de protection, c’est précisément l’absence de frontières, sur ce qui compte vraiment, entre la France et nous, qui saisit nos âmes.

Ce qui compte vraiment, c’est quoi? Une certaine idée de l’être humain dans la société. Il y a eu les grands ordres chrétiens, qui ont façonné nos deux pays jusqu’au XIXe siècle. Il y a eu la Réforme, qui a bouleversé nos deux patries, les Guerres de Religion en France comme en Suisse, l’Edit de Nantes, sa Révocation en 1685, l’ampleur du Refuge (un thème brûlant d’actualité), notamment sur Genève. Le moins qu’on puisse dire, c’est que nos destins sont liés.

Et puis, il y a eu les Lumières. La Révolution française, l’Helvétique chez nous (1798), le legs napoléonien sur nos cantons romands, les grands combats du dix-neuvième, tiens 1848 par exemple. Bien sûr, il y a ce qui nous sépare: structure centralisée d’un côté, fédéralisme des différences de l’autre. Décisions qui viennent d’en haut chez les uns, démocratie directe chez les autres.

Mais ce qui nous réunit est infiniment plus puissant. On peut avoir des contentieux sur la fiscalité, le secret bancaire, tout ce qu’on voudra: lorsque la chair de la France est attaquée par des forces barbares, nous sommes totalement avec nos voisins. Nous le sommes dans l’âme. Nous le sommes dans les cœurs. Nous le sommes par les forces de l’esprit. Aujourd’hui, en ces jours de douleur, la France c’est nous.