Les auteurs contemporains ont oublié d'écrire un livre essentiel. Celui sur la guerre du papier contre le numérique. Au cœur de l'intrigue, une bataille impitoyable sur la manière dont nous lisons et engloutissons les grands auteurs, le savoir, les idées et le rêve. Au bout d'un suspense insoutenable, le lecteur y apprendrait, sur tous les supports, que l'irréductible armée des bouquins en papier a finalement survécu à la redoutable horde des tablettes électroniques de l'empire digital.
Pas facile quand on est un jeune loup enfermé dans la deuxième dimension d'avoir la peau, pourtant si fine et fragile aujourd'hui, du sage livre papier; un objet en trois dimensions deux fois millénaire. Enthousiaste, la presse saluerait à l'unisson l'émergence d'un tel ouvrage. En rêvant un peu, les éditeurs et les journalistes se saisiraient de ses enseignements pour se renouveler et échapper à leur tour à la mise à mort programmée du papier journal.Ce grand livre manque cruellement dans nos bibliothèques. Il manque également au Salon du livre de Genève. Lui aussi, on le disait moribond à l'automne dernier. Au lieu de courber l'échine, ses responsables se sont montrés ingénieux. Ils ont réuni tous les acteurs de la chaîne du livre et fait front commun pour présenter une édition 2013 plutôt réussie. Ce faisant, ils n'ont laissé à personne le soin de créer un lien nouveau entre le livre papier et le lecteur. Un lien encore fragile et qui a besoin de temps pour se renforcer. Mais près de 94'000 visiteurs y ont cru. Preuve sans doute que quand on relève les défis avec talent, il y a de la place pour tous.