PRESSE • Familièrement on l’appelle à Zurich «die Alte Tante», «la vieille tante». La Neue Zürcher Zeitung, la NZZ pour les intimes, n’a jamais aussi bien porté son surnom. Car la santé de ce fleuron médiatique qui a véhiculé très haut les couleurs de la Suisse dans le monde, inspire de grandes inquiétudes au Filz, le gratin financier zurichois dont il fut longtemps la lecture incontournable.
Les problèmes de la NZZ ne datent pas d’hier. Depuis 2008, son tirage a chuté de 36’000 exemplaires, presque l’équivalent de la puissance de feu d’un quotidien régional comme la Liberté. Il dépasse de peu la barre des 100’000. La NZZ n’échappe pas à la mutation de la presse écrite dont la migration vers le numérique rend toujours plus obsolète la formule du journal papier. En novembre, le groupe s’est résigné à annoncer la fermeture de son imprimerie de Schlieren. La décision ne donne pas seulement des frissons aux syndicats qui déplorent la disparition de 125 emplois. L’impression de la NZZ ayant été confiée aux rotatives du concurrent Tamedia, elle émeut la rédaction où à ce choc succède celui du départ inopiné du rédacteur en chef Markus Spillmann. Cette dernière alerte coïncide avec une crise idéologique. Propriétaire de la Basler Zeitung, Christoph Blocher pourrait-il s’emparer de la NZZ? La menace est réelle et reflète la perte d’influence auprès des milieux financiers de la droite traditionnelle dont la NZZ était à ce jour le porte-étendard.
La NZZ n’est pas encore à l’agonie mais on ne peut s’empêcher de penser au destin de feu le Journal de Genève. En 1998, des banquiers genevois, lassés de soutenir l’étendard de la presse libérale malgré son passé prestigieux, confièrent au lausannois Edipresse, actuellement Tamedia, le soin de lancer Le Temps. Cruauté du sort, ce quotidien, repris depuis par Ringier, va quitter son siège de Genève pour s’installer à Lausanne.