Petits commerces

  • ©OLIVIER JAQUET

     Je veux vous raconter une rue de Genève que j’aime, qui me raconte et qui raconte ma ville: la rue Dizerens.

    J’y suis arrivée à 12 ans. Au dernier étage du numéro 1. A l’époque, je regardais pousser le centre commercial de Plainpalais qui emménageait en même temps que moi. Il y avait un kebab incroyable dans la rue où on mangeait souvent. Il a été depuis remplacé par Batista et son JetSet Café, un lieu de sociabilité portugaise.

    En 2003, mon paternel a ouvert Château Carton, au numéro 5. On vendait du vin en «bag-in-box». J’y travaillais pendant mes études et j’ai même repris le Biz quelque temps avant de filer la main à l’actuel Bibarium. Mais l’échoppe a également fermé en 2016, nous laissant tous un peu orphelins.

    En 2011, Angelo est arrivé sous mes fenêtres avec Casa Mozzarella, une production locale de fromages des Pouilles par des maîtres italiens. A 11h, on sentait l’odeur de la ricotta fraîche et je pouvais descendre pour en quémander, encore chaude de la préparation.

    Et le Spikisi de Kekko et Chicco, avec lesquels on a travaillé une nuit entière pour brainstormer sur le nom de l’enseigne. Le Lovely, salon de coiffure africain… Une tavola calda sicilienne, un luthier, un toilettage canin, un tapissier… Un écosystème. Une jolie vie.

    Des petits commerçants, souvent créatifs, toujours investis, qui créent du lien social, une communauté. Mais des commerçants sous tension et qui peinent à faire face à l’arrivée des grandes enseignes.

    Pourtant, qui mieux qu’eux peut être partenaire quand il s’agit de lutter contre les incivilités ou l’isolement social? Ils prennent des risques et ce sont eux qui font la Ville. Protégeons ces écosystèmes, individuellement et politiquement.