ÉTÉ • «Comment expliquer à ma fille ce qu’est un burkini et pourquoi certaines femmes le portent même quand il fait très chaud?», s’interroge Alain*. A l’origine du questionnement voire de la gêne de ce père de famille, la présence de deux femmes en vêtement islamique, à la piscine de Genève-Plage, lors d’un dimanche ensoleillé. «Personne n’est intervenu», témoigne ce quadragénaire, persuadé que le burkini est pourtant proscrit ici.
«Le burkini est interdit mais toléré», explique la personne à l’accueil, répondant à la question de savoir si l’on peut venir avec une amie en burkini. Concrètement, une femme a le droit de porter le vêtement controversé pour autant que personne ne s’en plaigne.
Règlements différents selon les communes
Un certain flou donc auquel s’ajoute le fait que le règlement n’est pas le même partout. La raison: le choix est laissé aux communes et aux piscines d’appliquer leurs propres règles en a matière. Du côté des différentes piscines municipales en Ville de Genève, le port du burkini tout comme celui d’une combinaison de natation ou de plongée est interdit. «Les seules tenues de bain autorisées dans l’enceinte des bassins pour les femmes sont: maillot de bain une pièce ou deux pièces, bras nus, jambe au maximum au-dessus du genou, pas de t-shirt», énonce l’article 22 alinéa 4 du règlement des installations sportives de la Municipalité, entré en vigueur en 2017. La question du burkini s’est-elle souvent posée depuis ? «Nous n’avons eu que quelques cas isolés», précise Nicolas Kerguen, collaborateur personnel de la maire, Marie Barbey-Chappuis, chargée de la sécurité et des sports. Et d’expliquer qu’un contrevenant se verra plutôt rappeler les règles que sanctionner.
A Carouge aussi, le burkini est interdit. Et ce, pour des questions d’hygiène et de sécurité. «Nos installations sont anciennes. Nous pouvons avoir de la peine à garantir les normes d’hygiène, notamment lorsqu’il fait chaud. C’est pour cette raison que nous interdisons les vêtements trop grands, comme le burkini mais aussi les shorts», explique Bernard Sautier, responsable des sports. Autre argument: la sécurité. «Lors d’un sauvetage, les tissus trop imposants sont un problème supplémentaire. Par exemple s’il faut se servir d’un défibrillateur», détaille la Municipalité.
Gardiens de bain entraînés au Lignon
Des arguments qui n’ont pas été retenus du côté de Vernier et sa piscine du Lignon, où le burkini est autorisé depuis six ans. «C’est un maillot de bain, il est constitué du même tissu que les costumes de bain», argue Valérie Pillonel, cheffe de service. Concernant la sécurité, cette autorisation demande tout de même un entraînement supplémentaire. «Lors des formations de sauvetage, les gardiens sont entraînés avec des personnes ayant des maillots de bain couvrant de grandes surfaces du corps», poursuivent les autorités communales. Qui précisent encore que dans la trousse de secours, il y a toujours une paire de ciseaux et un rasoir pour couper les vêtements.
En robe de mariée ou en smoking
Quid enfin du port du burkini dans le lac et les cours d’eau du canton? «Il s’agit de l’espace public, précise le service communication de la police cantonale. De ce fait, si une personne veut se baigner en robe de mariée ou en smoking, rien ne lui interdira. Tout ce qui est autorisé sur la voie publique, l’est également dans l’eau du moment que cela ne pollue pas le milieu.»
Interviewée sur le burkini dans l’émission Hautes fréquences, sur la RTS, Meriam Mastour, juriste, consultante sur les questions d’inégalités et de discrimination et présidente de l’association féministe des Foulards Violets regrette cette stigmatisation: «Le burkini est un vêtement comme un autre. Toute femme et personne appartenant à une minorité de genre doit pouvoir décider de la manière dont elle s’habille pour les raisons qui lui sont propres», souligne-t-elle. TR et MP