«Je rentre à 23h après le travail. Je fume une ou deux cigarettes avant d’aller me coucher et à chaque fois c’est le drame avec mon voisin. Il frappe les murs, hurle, menace de me faire expulser. C’est l’horreur», s’énerve Béatrice, qui vit près de l’hôpital. En cause dans ce conflit: des cloisons trop fines entre les appartements qui, en plus du bruit, laissent allégrement passer les odeurs d’un logement à l’autre. «Pourtant, j’aère systématiquement et je ne fume vraiment pas beaucoup», déplore la jeune femme, qui a même reçu une lettre de la régie pour la mettre en garde. «Il s’avère que des odeurs de fumée émanent en grande quantité de votre logement et incommodent fortement vos voisins. Nous vous demandons de prendre toutes les précautions utiles afin de cesser d’importuner votre voisinage», indique le courrier.
Fumer chez soi
De quoi faire bondir Béatrice. «C’est vrai que le bail que j’ai signé stipule que je n’ai pas le droit de fumer dans mon appartement, admet-elle. Mais ça me paraît impossible d’interdire une telle chose.» Qui a raison dans cette affaire? «Les régies ne peuvent pas interdire de fumer chez soi. C’est une question de respect de la sphère privée», répond catégoriquement Christian Dandrès, avocat à l’Association suisse des locataires (Asloca). D’après lui, impossible de résilier un bail pour ce seul motif. «Il faudrait que la situation soit particulièrement grave, par exemple si un voisin se montre menaçant ou s’il n’est tout simplement plus possible de cohabiter.»
Et pourtant, un locataire incommodé a également des droits (lire encadré). «Dans le cas où les nuisances sont dues à un défaut d’isolation, il est possible de s’adresser à la régie pour remédier au problème», selon l’avocat. Qui précise que si la ventilation est en cause, le locataire peut demander une révision du système d’aération.
Gestes simples
L’Asloca rappelle en outre que des gestes simples peuvent permettre d’éviter de nombreux conflits. «Il faut avoir des égards pour le voisinage. Par exemple, en fumant dans une pièce qui gêne moins, notamment si elle est à côté d’une chambre d’enfants», détaille Christian Dandrès. Selon lui, une marge d’appréciation existe. L’association est d’ailleurs régulièrement sollicitée pour des conflits de cet ordre.
«Parfois, ces difficultés peuvent être très fortes», témoigne l’homme de loi. Si le conflit devient trop important, l’Asloca invite à se tourner vers la médiation. «Il faut privilégier le dialogue, estime Christian Dandrès. Parfois, il suffit d’un peu aménager ses horaires pour trouver une solution. Mais pour cela, il faut pouvoir échanger avec ses voisins, ce qui n’est pas toujours le cas. Certains locataires craignant d’aller frapper à la porte.»