«Il faut taxer les logements vacants»

CRISE DU LOGEMENT • Déposé le 3 mars, un projet de loi socialiste vise à taxer les logements inoccupés depuis plus de six mois. Tollé attendu chez les propriétaires.

  • Carole-Anne Kast, conseillère administrative socialiste à Onex. DEMIR SÖNMEZ

    Carole-Anne Kast, conseillère administrative socialiste à Onex. DEMIR SÖNMEZ

«Ce projet de loi vise à lutter contre la pénurie de logements qui frappe durement Genève», explique d’emblée Carole-Anne Kast, conseillère administrative socialiste (PS) à Onex et secrétaire générale du Rassemblement pour une politique sociale du logement. «Pour inciter les propriétaires à cesser de proposer artificiellement des appartements à des prix prohibitifs, tous les logements vacants depuis plus de six mois seraient taxés», détaille-t-elle. Avant de poursuivre: «Sur les sites des régies, vous trouvez de nombreux cinq-pièces à louer à plus de 8000 francs de loyer mensuel. Peu de personnes peuvent payer un tel loyer. Si après six mois , ces appartements ne trouvent toujours pas preneur sur le marché locatif, la nouvelle loi prévoit de les taxer. Pour éviter cette punition, les propriétaires devraient rendre ces appartements accessibles à la population en baissant les loyers.»

Faire ses preuves

Atout majeur dans les arguments de la future présidente du PS cantonal, cette taxe sur la vacance a déjà fait ses preuves en France. «Dans les villes où elle est appliquée, les logements vacants diminuent», confirme Carole-Anne Kast. Mais de combien de logements parle-t-on au juste à Genève? «Il y avait 801 logements vacants à vendre ou à louer en 2013», chiffre Christian Dandrès, député socialiste et avocat à l’Asloca, l’association de défense des locataires. «La difficulté est de savoir depuis combien de temps ils étaient vacants. Si on ne retient que les objets inoccupés, offerts à la location et habitables, plus de 580 appartements pourraient être visés par le projet de loi», précise-t-il. Avant de conclure: «Cette loi doit permettre de réguler le marché en libérant rapidement du foncier déjà bâti et habitable. C’est aussi un bon moyen de s’en prendre au comportement purement spéculatif de certains propriétaires».

Temporiser

Pas sûr du tout que les partis bourgeois et les propriétaires attachés à la protection de la propriété privée apprécient de passer pour des gens fortunés peu civiques. «J’attends de connaître le contenu du projet de loi avant de me déterminer, explique de son côté Cyril Aellen, député PLR et président de la Chambre genevoise immobilière. «Attention cependant à ne pas devenir le seul canton en Suisse où plus personne ne construira un seul logement», prévient-il.

Même prudence du côté du Département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (DALE). «Il est prématuré que le DALE s’exprime sur un projet dont il n’a pas été saisi officiellement, botte en touche Nicole Bovard Briki, chargée de communication.

Remède miracle pour les uns, pure provocation pour les autres, le débat sur ce dossier délicat risque d’être animé ces prochaines semaines à la Commission du logement du Grand Conseil.

«Cheval de Troie»

GiM • Réponse de la bergère au berger. Carole-Anne Kast, future présidente du Parti socialiste genevois, revient sur le projet de loi MCG visant à transformer les surfaces commerciales en habitat (lire GHI du 27 février). «Nous avions commencé à travailler sur cette possibilité», explique la secrétaire générale du Rassemblement pour une politique sociale du logement. «Le MCG s’est empressé de déposer un projet de loi pour nous couper l’herbe sous les pieds», affirme-t-elle. Avant d’ajouter: «Le problème, c’est que leur projet de loi propose de supprimer le contrôle des loyers après travaux de réaffectation. C’est un véritable cheval de Troie. En réalité, le marché du locatif se retrouverait avec encore plus de logements inabordables pour la population.»