Non-port du masque: prune salée pour un primeur

Le maraîcher affirme avoir été amendé alors qu’il avait descendu son masque pour boire un café avec son ouvrier et qu’il n’y avait pas de client. Le président de l’Association des marchés s’insurge. La Ville de Genève répond.

  • Philippe Dupraz-Dange: «1250 francs, c’est exorbitant!» LA CORBEILLE DE FRUITS

Voilà une prune que le vendeur de fruits Philippe Dupraz-Dange a bien du mal à avaler! Le 7 avril, ce primeur genevois a reçu une amende de 1250 francs pour non-port du masque. Une somme conséquente à laquelle s’ajoutent les 100 francs dont a écopé son employé. Les faits reprochés remontent au 10 février.

Ce mercredi-là, comme tous les mercredis et les samedis, le maraîcher installe son étal à Rive. «On venait de finir de mettre en place le banc avec mon ouvrier qui est aussi le compagnon de ma fille, raconte-t-il. Il n’y avait pas encore de client. On avait notre masque sous le menton car nous buvions le café.»

Ni injurieux, ni vindicatif

Il précise qu’une banderole tendue devant son stand impose a fortiori une distance de deux mètres entre lui et ses potentiels clients. «Les agents de la police municipale (APM) sont arrivés et nous ont dit qu’il fallait mettre le masque», souligne-t-il. S’il reconnaît avoir fait une remarque un brin espiègle, Philippe Dupraz-Dange assure n’avoir été ni injurieux, ni vindicatif.

Tandis qu’il remet son masque pour servir un client, son ouvrier, lui, poursuit la discussion avec les APM. «On ne les a pas dénigrés. On a juste argumenté en demandant à quoi ça sert tout ça au fond...», insiste le maraîcher. Il affirme que les APM sont repassés environ une heure plus tard pour adresser une amende de 100 francs à son employé et indiquer au primeur qu’il recevrait prochainement une amende. Celle-ci est arrivée entre les mains de son destinataire le 7 avril. «Certes, je m’y attendais, mais 1250 francs, c’est exorbitant! lance Philippe Dupraz-Dange. Je n’en reviens pas. C’est le chiffre d’affaires d’une petite journée qui part en fumée.»

Interrogé par nos soins sur cet épisode, le Département de la sécurité et des sports (DSSP) de la Ville de Genève livre la version des agents de la police municipale (APM). Ces derniers assurent avoir fait un premier passage et avoir averti le duo. «Lors d’un deuxième passage, cinq minutes plus tard, les personnes concernées ne portaient à nouveau pas le masque de manière conforme.»

La police municipale indique que lors de leur conversation avec l’employé, ce dernier «leur a expliqué qu’il était anti-masque, que le Covid était une histoire inventée de toutes pièces afin de manipuler la population.» De quoi inciter les APM à mettre un terme à la discussion et à verbaliser les deux contrevenants.

«Amendes disproportionnées»

Le primeur, lui, compte bien faire recours. Et a, pour ce faire, demandé l’aide de l’Association des marchés de Genève (AMG). Son président Willy Cretegny regrette qu’on en soit arrivé là. «C’est le second cas aberrant. En décembre, on a déjà eu une maraîchère qui a reçu une amende de 330 francs alors qu’elle fumait une cigarette derrière son stand.» Et d’ajouter: «Par principe, on va faire opposition.»

«Ce n’est pas normal qu’on mette des amendes aussi disproportionnées! fulmine Willy Cretegny. Cela devient difficile pour tout le monde, il faut savoir garder certaines proportions.»

Port du masque obligatoire sur les marchés

Le Département de la sécurité et des sports (DSSP) rappelle que «dans le contexte sanitaire actuel, le port du masque est obligatoire sur les marchés. Nous attendons des marchands et de leurs employés qu’ils soient exemplaires à ce sujet. La grande majorité l’a compris et joue bien le jeu. Quant à la petite minorité qui ne respecte pas les règles, elle s’expose à une contravention.»

Sur la question du montant des amendes, le porte-parole de la police, Jean-Philippe Brandt précise que les ordonnances pénales sont délivrées par le service des contraventions mais que «les montants sont fixés par le pouvoir judiciaire. Ils dépendent notamment du fait qu’elles s’adressent à un simple usager ou un responsable de commerce ou encore à un restaurateur.» Et le porte-parole d’ajouter: «C’est une période difficile pour tout le monde mais, ce sont les règles et elles doivent continuer à s’appliquer.»