Feux: les automobilistes voient rouge

Les conducteurs se plaignent des feux rouges interminables en ville, y compris la nuit. L’Etat recherche une nouvelle stratégie mais déplore des ressources humaines en ingénieurs limitées. Le problème pourrait être en partie résolu par l’installation d’un dispositif de détecteur de véhicules.

  • Rue de la Servette, comme place de Montrbrillant, des bouchons se forment à toute heure, même une fois la nuit tombée.TR

    Rue de la Servette, comme place de Montrbrillant, des bouchons se forment à toute heure, même une fois la nuit tombée.TR

Exergue

Signature

«C’est inadmissible! J’ai mis presqu’un quart d’heure pour descendre la rue de la Servette alors que je suis quasi la seule voiture à cette heure-ci. On se fout de nous», s’emporte Sarah au volant de sa vieille auto. A l’origine de sa colère: les six feux rouges désynchronisés, qui l’ont contrainte à s’arrêter pendant de longues minutes, alors qu’elle rentre d’un dîner vers 1h du matin.

«Mon moteur n’est pas équipé du système d’arrêt-démarrage automatique donc, en plus, ça dérange les voisins», déplore-t-elle. D’autant que le conducteur juste derrière elle donne un coup de klaxon à peine le feu passé au vert. «Et c’est comme ça tout le temps. Même en pleine nuit, on se retrouve avec un bouchon sous nos fenêtres», commente un habitant du quartier qui observe la scène en promenant son chien. «A croire que l’Etat le fait exprès», tempête-t-il.

«Cet axe est certainement le plus péjoré du canton et bien entendu, c’est un problème pour l’Office cantonal des transports (OCT), reconnaît Karen Troll, chargée de communication au Département des infrastructures (DI). Pourtant, des solutions existent: feux clignotants à l’orange pendant la nuit et le dimanche, capteurs de véhicules dans la chaussée, caméras placées à hauteur des feux. A Genève, de nombreux carrefours sont déjà équipés de tels dispositifs. Mais pas tous. (lire ci-dessous)

Une volonté de l’Etat

Alors, pourquoi un tel immobilisme à la rue de la Servette? «Cet axe est priorisé pour les transports publics. Il débouche sur la rue Chantepoulet qui doit absorber les véhicules en provenance de Terreaux-du-Temple, de la rue de Lyon, de la Servette, de Malatrex et du parking de Cornavin, soit cinq axes qui arrivent sur un seul. Il est impossible qu’un seul axe puisse absorber le trafic issu de cinq autres», justifie Karen Troll. Traduction: l’Etat freine volontairement l’entrée des véhicules en ville sur cette rue pour ne pas surcharger les autres.

Autre argument avancé par les autorités: la forte présence des transports en commun. «Entre ces cinq axes et Chantepoulet se trouve la place Lise-Girardin (anciennement place des 22-Cantons), où 250 convois TPG circulent chaque heure aux heures de pointe du soir. Comme la rue Chantepoulet débouche elle-même sur le quai du Mont-Blanc, axe majeur, il est impossible, avec les charges de trafic actuelles et la Loi sur la mobilité cohérente et équilibrée (LMCE) de diminuer la capacité de cet axe pour augmenter celle de Chantepoulet.»

Passez ou plutôt roulez, il n’y a rien à voir? Pas tout à fait. Les autorités affirment chercher des solutions pour faire diminuer les nuisances sonores et atmosphériques en ville, notamment la nuit. Mais, elles soulèvent plusieurs contraintes: d’une part, rénover un carrefour coûte entre 250’000 et 500’000 francs, d’autre part, les ressources humaines en «ingénieurs gestion trafic» sont très limitées, d’où des délais non négligeables pour faire le travail», explique Karen Troll.

Espoir d’amélioration

Actuellement, un autre axe est à l’étude: celui du Pont-d’Arve, près de Plainpalais. «Nous y analysons depuis deux mois la stratégie de régulation que nous pourrions déployer afin de ne voir ici aucun véhicule à l’arrêt pour le bien-être des habitants», détaille Karen Troll. Elle ajoute: «Quand nous aurons trouvé cette stratégie, nous aurons besoin de deux semaines par carrefour (il y en a six au total) pour définir les principes de régulation, puis encore deux semaines par carrefour pour le programme. Suivront la mise en service, le monitoring et les adaptations mineures pour améliorer la coordination.»

Les changements risquent – comme pour le retour de Sarah à son domicile – de prendre du temps.