Moins de poulet, plus de lentilles
Delphine Klopfenstein Broggini, présidente des Vert.e.s Genève
OUI • La Suisse est un trop petit pays pour y abriter des centaines de millions d’animaux de rente. Pour les nourrir, elle doit importer 1,4 million de tonnes de fourrage, cultivé sur les cendres des déforestations mondiales.
C’est insensé! D’un côté, la Suisse a sur son territoire plus de bêtes que ce qu’elle pourrait élever sans importations, et de l’autre, nous consommons beaucoup trop de viande. En effet, les produits d’origine animale sont responsables de 85% des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole. D’après le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), nous devrons diminuer de près du tiers notre consommation de viande pour atteindre les objectifs des accords de Paris.
L’initiative pour l’élevage intensif est la réponse raisonnable à ce paradoxe helvétique: produisons moins de viande mais de meilleure qualité. Cette réponse est raisonnable parce qu’elle respecte le bien-être animal et le climat, et accompagne l’agriculture vers plus de durabilité.
En Suisse, la moitié de nos terres arables est utilisée pour nourrir les animaux de rente, ce qui réduit notre sécurité alimentaire. En effet, la surconsommation carnée nécessite de grandes surfaces de terres agricoles. Ces terres pourraient fournir bien plus de nourriture si elles étaient davantage destinées à la culture d’aliments végétaux, dont des protéines végétales, nourrissant directement les êtres humains.
Ce n’est pourtant pas si compliqué de troquer une fois sur trois une cuisse de poulet contre un bol de lentilles! Alors glissez un oui dans les urnes le 25 septembre pour interdire l’élevage intensif, garantir aux animaux un accès à l’extérieur et réduire leur nombre par exploitation!
A bas le diktat alimentaire!
François Erard, directeur d'AgriGenève
NON • Il ne faut pas se tromper sur la réelle intention des porteurs de l’initiative contre l’élevage en Suisse. Orchestrée par des milieux antispécistes et végans doctrinaires, elle vise à imposer à toute la population un diktat alimentaire: interdire, à terme, la consommation de produits d’origine animale: viande, œufs, lait, yogourts ou fromages.
Une initiative sur une telle interdiction n’ayant aucune chance devant le peuple, ils s’attaquent dans une première étape à l’agriculture. Au prétexte que l’élevage serait intensif en Suisse et sous couvert d’y améliorer le bien-être animal. Or, notre pays dispose de la loi la plus sévère au monde en matière de protection des animaux. De nombreux labels sont déjà proposés aux consommateurs qui souhaitent aller plus loin que les normes de base mais pour des raisons de prix élevés, la demande ne suit pas l’offre.
L’application de l’initiative provoquerait une forte réduction de la production d’aliments d’origine animale, de – 75% pour les œufs à -90% pour la volaille de chair. L’initiative veut nous faire croire que la Suisse pourra interdire l’importation de produits ne respectant pas son texte. C’est un leurre: la Suisse a passé des accords internationaux qui empêchent de telles restrictions.
Si l’effectif maximum de poules pondeuses est de 18’000 par ferme en Suisse, des élevages allemands en comptent 600’000. C’est de ce type d’élevage qu’il faudra importer les œufs que nous ne produirons plus en Suisse. Un bel autogoal en matière de bien-être animal! Pour garder la liberté de choix du contenu de nos assiettes et une production agricole locale, il faudra glisser un non dans l’urne le 25 septembre.