«Payer soi-même ses béquilles: c’est un scandale!»

SANTÉ • Après un accident, les personnes blessées doivent financer elles-mêmes une partie du matériel médical de base avant d’être remboursées. Une situation qui fâche.

  • Pour les adultes, seules les béquilles achetées sont remboursées. 123RF

    Pour les adultes, seules les béquilles achetées sont remboursées. 123RF

    «Après un accident, ma femme avait besoin d’une béquille pour se déplacer. Mais une fois à la pharmacie, j’ai été très surpris de devoir débourser 200 francs de ma poche pour l’obtenir, avec quelques médicaments en plus. Ce n’est vraiment pas normal», dénonce Frédéric*, commercial dans une grande entreprise. Et de s’interroger: «Comment fait-on si on n’a pas cet argent? Ou si c’est une fin de mois compliquée? Certains ne pourraient-ils pas aussi être tentés de faire l’économie de ces frais, quitte à mettre leur santé en danger?»

    La réponse est donnée par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), qui précise que deux systèmes distincts existent. D’une part, celui du tiers garant, de l’autre, celui du tiers payant. Attention, c’est un peu technique.

    Avance des frais

    Dans le système du tiers garant, la personne assurée paie la facture et l'envoie à l'assureur pour qu'il la rembourse, déduction faite de sa propre participation aux coûts (franchise et quote-part). Dans le système du tiers payant, le fournisseur de prestations (dans ce cas, le centre de remise de la LiMA) envoie directement la facture à l'assureur. «L'assureur paie la totalité du montant et facture à la personne assurée la participation aux coûts. Dans ce système, la personne assurée ne doit pas faire l'avance des frais», résume Grégoire Gogniat, porte-parole auprès de l’OFSP.

    Jugée non rentable

    Plus largement, que dit la loi? «Pour les béquilles pour adultes, seul l’achat est remboursé par l’assurance obligatoire des soins. Pour les enfants, tant l’achat que la location sont remboursés», poursuit le porte-parole. Il précise également que «l’efficacité, l’adéquation et le caractère économique des prestations sont contrôlés périodiquement, comme le veut la LAMal (art. 32, al.2).»

    De quoi encourager à privilégier l’achat, plutôt que la location. Une situation dénoncée pas plusieurs voix en 2017, au moment où le remboursement des béquilles a été revu à la baisse. A Berne, on ne s’émeut pas de cette situation. «La location de béquille pour adultes a été jugée non rentable, car les frais d’enregistrement, de reprise, de remise en état des béquilles et de nettoyage sont disproportionnés par rapport à l’achat. C’est pourquoi, avant même ce changement législatif, les béquilles étaient essentiellement vendues dans le principal canal de distribution des hôpitaux, des cabinets médicaux et des magasins d’articles sanitaires», détaille l’OFSP.

    *nom connu de la rédaction

    Enfants atteints du cancer pas épargnés

    TR • Comme Frédéric, de nombreuses associations jugent, elles aussi, insuffisante la prise en charge des différents coûts de la santé. C’est notamment le cas de la faîtière «Cancer de l’enfant en Suisse» qui, dans ses derniers rapports, pointe plusieurs problèmes tels que la non prise en charge de certains traitements par les assurances maladies, des délais d’attente excessivement longs ou encore une bureaucratie qualifiée de trop lourde.

    Des difficultés auxquelles a justement été confrontée Rahel Marciano, présidente de l’association romande des familles d’enfants atteints d’un cancer (ARFEC) et elle-même mère d’un garçon malade. «Lorsque mon fils a eu besoin d’une chaise roulante, nous avons attendu six mois pour que notre dossier soit validé. L’assurance nous a demandé de payer nous-mêmes et s’est engagée à nous rembourser plus tard. Résultat: nous avons été obligés de multiplier les démarches pour nous faire indemniser, ce qui nous a pris du temps et de l’énergie», déplore-t-elle.