Poggia: «Je ne suis pas candidat au Conseil d’Etat... sauf si!»

ELECTIONS 2023 • Le conseiller d’Etat MCG annonce qu’il ne se représentera pas. Toutefois, il n’exclut pas de rejoindre l’ex PLR Philippe Morel sur un ticket double selon le résultat du premier tour. Explications.

  • Mauro Poggia assure avoir pris la décision de ne pas se représenter ce week-end. MP

    Mauro Poggia assure avoir pris la décision de ne pas se représenter ce week-end. MP

La question se pose depuis plusieurs mois: le conseiller d’Etat Mauro Poggia sera-t-il candidat à sa succession en 2023? On le disait hésitant, un brin fatigué par ses neuf années chargées et désireux de tenter sa chance au Conseil des Etats. Le nom du PLR Philippe Morel était murmuré au printemps déjà pour le remplacer. Blick.ch a rompu le suspense jeudi 3 novembre annonçant que Mauro Poggia ne se représenterait pas. Dans une interview donnée au GHI, après un ultime week-end de réflexion, le conseiller d’Etat MCG, âgé de 63 ans, confirme avant d’émettre un bémol... de taille. Interview.

GHI: C’est confirmé, vous ne serez pas candidat au Conseil d’Etat en 2023? Mauro Poggia: Je ne me représente pas. Après passablement d’hésitations, ma décision est prise. Cela n’a pas été facile. D’autant qu’il y a encore tant à faire. Cependant, il y a aussi un peu de fatigue après deux législatures intenses.

– Quand avez-vous pris votre décision? Honnêtement: ce week-end! Nous en avons rediscuté en famille. Quand je suis entré au Conseil d’Etat, mon fils avait 10 ans. Il en a 20. Les premières années n’ont pas été faciles, notamment à cause de l’image du MCG. Les choses ont évolué depuis. Désormais, mon parti porte le même message mais avec des mots plus apaisés.

– Qu’allez-vous faire? Mon intention, c’est de faire autre chose: mon métier d’avocat, œuvrer à la défense des assurés... On peut jouer un rôle fort sur le plan politique sans être un élu du peuple. Je compte aussi ralentir un peu le rythme: travailler à 100% au lieu de 150%!

– Il n’y a donc aucune chance que vous soyez conseiller d’Etat en 2023? Je n’exclus pas de me présenter au second tour. S’il s’avère que le MCG est soutenu par une proportion croissante de la population. Alors, j’envisagerai, comme la loi le permet, de me présenter au second tour aux côtés de notre candidat: Philippe Morel (lire l’encadré ci-dessous).

– De quoi anéantir ses chances? Pas du tout: nous sommes deux candidats crédibles et compétents, nous pourrions passer tous les deux! Comprenez bien: aujourd’hui, ma décision serait de ne pas y retourner. Durant neuf (et j’espère dix ans), j’ai pu mener ma politique. Je ne veux pas faire la législature de trop et me retrouver minorisé à devoir exécuter des décisions qui me seraient imposées.

– Cette option repose sur un succès du MCG mais sans votre candidature au Conseil d’Etat, ses chances s’amenuisent... Mon intérêt, c’est de faire en sorte que le MCG reste dans le jeu politique. C’est un bon parti capable de soutenir des projets bénéfiques pour les Genevois, que lesdits projets émanent de ses rangs, de la gauche ou de la droite. Je suis tête de liste pour le Grand Conseil car je veux que le MCG garde et même renforce sa place au parlement ainsi que son rôle d’arbitre. L’objectif: éviter la polarisation.

– Serez-vous candidat au Conseil des Etats? Cette décision se prendra après les élections cantonales avec le MCG mais aussi avec d’autres partis. Je ne serai pas candidat la fleur au fusil. Si je me présente, c’est pour être élu et pour avoir les moyens de mener des combats qui me correspondent. Tels que la défense des assurés.

– Quel bilan tirez-vous des neuf années passées? J’ai beaucoup appris. Si je suis considéré comme quelqu’un qui a fait le job, c’est aussi grâce à tous mes collaborateurs. J’ai été à la tête de quatre départements. Pour l’emploi, une directive de préférence pour nos chômeurs a été mise en place à l’Etat et dans toutes les entités subventionnées. Dans les affaires sociales, nous avons instauré la continuité entre la fin du chômage et l’aide sociale et renforcé la lutte contre la fraude. J’ai lancé l’affaire Uber alors qu’à l’époque l’ubérisation semblait acceptée par tous. J’ai aussi œuvré pour encaisser la dette de la France pour les indigents. 41 millions ont ainsi pu être récupérés. Sans compter la gestion de la crise Covid...

– Le pouvoir va vous manquer non? Dans un gouvernement collégial, le pouvoir est relatif. C’est plutôt le privilège de choisir des priorités pour le bien de la collectivité. Et de le faire avec implication et engagement. Genève est un canton extraordinaire. Aujourd’hui, je suis un peu inquiet... Une inquiétude financière qui se meut en inquiétude sociale.

«Ce n’est pas par opportunisme»

MP • En l’absence de Mauro Poggia dans la course au Conseil d’Etat, c’est le député PLR Philippe Morel qui représentera le MCG. «Si on a accepté qu’il vienne au MCG, c’est qu’on juge et on jauge l’homme depuis près d’un an, explique Mauro Poggia. A travers son envie de défendre les Genevois, il incarne parfaitement la continuité de mon action au gouvernement.»

De son côté, l’ancien directeur du département de chirurgie des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), âgé de 70 ans, ne cache pas sa joie d’être candidat. «Genève traverse une période difficile. Il faut des gens qui rassurent à la barre. Je veux œuvrer pour redonner confiance aux Genevois, les aider à surmonter les incertitudes du lendemain, du type: vais-je toucher mon AVS? Ma fille va-t-elle trouver du travail?»

Pourquoi ne pas le faire au sein du PLR? «Je désire participer avec un rôle exécutif. J’en ai déjà émis le souhait. Au terme d’un processus démocratique, le PLR ne m’a pas désigné. Aujourd’hui, le MCG m’en offre la possibilité.»

De là à en déduire que c’est par opportunisme que cet ex PDC, un temps dragué par le GEM (Genève en marche) d’Eric Stauffer, atterrit au MCG il n’y a qu’un pas... «Je ne suis pas un opportuniste, tranche le chirurgien. Dans ma carrière professionnelle, j’ai eu des dizaines de propositions pour rejoindre le privé. Je suis resté aux HUG. J’ai eu une vie plus que remplie. Je n’ai plus d’ambition personnelle. Aujourd’hui, je veux contribuer à influencer le cours des choses et venir en aide à la population, en dépassant les clivages gauche/droite.» Reste à convaincre les électeurs d’ici avril 2023.