Un bâtiment flambant neuf, des effectifs supplémentaires et une commissaire fraîchement entrée en fonction (le 4 avril) en la personne de Fiona Manenc. Après neuf mois sans personne à sa tête, suite au départ après six mois de la commissaire Amandine Eustachy en juillet 2021, la police nationale d’Annemasse reprend du poil de la bête. La nouvelle commissaire, âgée de 33 ans et ayant travaillé auparavant dans la banque, revient sur son arrivée, ses objectifs et évoque les dossiers chauds de la délinquance et criminalité transfrontalières.
GHI: Après neuf mois sans commissaire, vous entrez en fonction, ça en a mis du temps, non? Fiona Manenc: C’est lié aux nominations au niveau national. Mais, en réalité, cela fait plusieurs mois que je suis en contact avec le commandant Bruno Rongier qui a assuré l’intérim. Cela s’est fait en douceur. D’autant que j’étais déjà directrice départementale adjointe à Annecy, je connais donc déjà bien la circonscription.
– Votre prédécesseure avait déclaré dans la Tribune de Genève être «étonnée par l’ampleur de la délinquance» à Annemasse. Vous partagez sa surprise? Je ne suis pas surprise. Même si je suis née dans le Val d’Oise (région parisienne), je connais bien la région. J’ai fait mon stage de fin d’études ici à Annemasse, en 2019. C’est surtout une circonscription intéressante avec un bon travail d’investigation consistant à gratter, à remonter des filières, notamment liées au trafic de stupéfiants. Par ailleurs, c’est une région riche, qui attise les convoitises. Du point de vue du policier, on peut faire de belles affaires!
– La particularité de cette zone police, c’est aussi la proximité de Genève. Qu’est-ce que ça change? La délinquance n’a pas de frontière. Le territoire n’est pas cloisonné. Le transport de marchandises comme les flux de personnes sont facilités. C’est une richesse. Il faut que nous aussi nous puissions tirer parti de ces échanges.
– Comment? En collaborant. Nous nous échangeons des informations à travers l’Unité opérationnelle mobile, qu’on appelle aussi la BOM. Composée de deux policiers français et cinq suisses, elle permet d’assurer une continuité entre les actions de la police genevoise et française. Chacun reste compétent chez lui mais, grâce à la BOM, c’est fluide. Il y a aussi le Centre de coopération policière et douanière qui nous permet de nous transmettre des informations. Enfin, nous nous voyons régulièrement avec les autorités policières genevoises pour parler des dossiers du moment.
– Quels sont les dossiers chauds? Nous échangeons beaucoup au sujet des rodéos. Avant celui qui a eu lieu à Annecy le 30 avril (ndlr: réunissant 200 voitures dont des Genevois), nous avions reçu une alerte pour un rodéo à Annemasse en janvier. Ils ont finalement renoncé. On reste mobilisé.
– Les Bandidos étant basés à Annemasse, participez-vous à l’enquête sur la fusillade qui a eu lieu à Plainpalais entre eux et les Hells Angels? On ne participe pas à l’enquête mais nous sommes en alerte et mobilisés aussi sur ce sujet.
– Il y a eu d’autres affaires transfrontalières depuis votre arrivée? La semaine dernière, nous avons démantelé une équipe de receleurs de vélos électriques. Ils les volaient en Suisse et les stockaient en France.
– Quid de la «racaille d’Annemasse» qui devait, selon l’UDC, débarquer à Genève grâce au Léman Express? (Elle sourit) Dans les trains, en gare d’Annemasse, dans les bus et les trams, on procède à des contrôles et des patrouilles, on n’a pas relevé de grosses problématiques de délinquance depuis la mise en service de ces moyens de transport. Ils sont utilisés essentiellement par les travailleurs.
– Reste que le quartier du Perrier craint... Ce n’est pas le Bronx! On y va. Il y a certes des points de deal mais ils se déplacent. On les surveille, on met la pression. Qui plus est, le Perrier avec Livron et Château Rouge ont été désignés comme «quartier de reconquête républicaine». On a bénéficié de renfort d’effectifs ce qui nous a permis de créer une brigade spécialisée de terrain sur ce secteur.
– La police d’Annemasse n’est plus en sous-effectif? Aujourd’hui, il y a 130 policiers (2/3 d’hommes et 1/3 de femmes). Cela reste tendu, notamment au niveau de l'investigation. On continue de recruter mais le coût du logement dans la région complique le processus.