«C’est une vitrine sociale et un modèle d’ouverture»
Philippe Leu, pasteur chargé de l’association Evangile et travail.
Grandeur majestueuse d’un édifice où la voix fait écho. Ici, un orgue, là, des vitraux et au sommet parfois une croix, un clocher. Aucun doute, il s’agit bien d’un temple ou d’une église. Et pourtant à y regarder de plus près, de drôles de fidèles les occupent. Ces lieux ont en effet été vendus, désacralisés ou désaffectés. En cause? Des croyants moins fidèles, des dons qui ne suffisent plus à entretenir les édifices et des espaces devenus obsolètes. Ainsi, dans les cantons de Genève et Vaud, les idées insolites pour remettre autrement ces «églises» au milieu du village fleurissent. «Cela fait dix ans que l’association sportive Les amis montagnards a acheté l’église du Petit-Lancy», explique Isabelle Terrier, présidente de l’association. Face à l’entrée, droit devant, un mur d’escalade impressionnant est érigé sous la nef. Si le lieu a perdu son esprit religieux, l’idée d’ascension, elle, persiste. «Cette église a été construite en 1904 et a servi de lieu de culte pendant 50 ans avant d’être rachetée par une Cidrerie puis par une entreprise qui s’en servait comme dépôt de boisson», retrace la présidente.
Garder mais transformer
Du côté du temple des Pâquis, ce n’est pas le septième ciel que l’on vise mais la solidarité. A l’intérieur, dealers, sans papiers, personnes en difficulté se croisent. «Trois associations y cohabitent, raconte Dominique Hiestand, Président de l’Espace solidaire des Pâquis. Deux d’entre elles sont laïques. Ce temple permet de recevoir des personnes en difficulté à qui l’on offre un accueil d’urgence ou un service juridique». Le lieu a été transformé sous l’impulsion de l’Eglise protestante elle-même. «C’est une vitrine sociale pour l’Eglise et un modèle d’ouverture et de diversité, s’enthousiasme le pasteur Philippe Leu, chargé de l’association Evangile et travail. Mais si certains édifices comme celui-là, conservent leur âme, d’autres sont tout simplement vendus.
Manque de fidèles
«Nous avons des problèmes financiers, reconnaît Eric Vulliez, codirecteur responsable de l’immobilier de l’Eglise protestante de Genève. Pour tenir le budget et payer les pasteurs, nous vendons à regret certains biens». Sur les 51 temples existants à Genève, deux d’entre eux ont été vendus, soit le temple du Grand-Lancy et le Centre œcuménique des Avanchets. «Nous veillons à ce que les édifices vendus soient utilisés dans un but d’intérêt public», souligne-t-il. Dans le canton de Vaud, quelques lieux comme la chapelle des Terreaux à Lausanne ont été transformés. «Il est difficile de répertorier tous les lieux vendus, car nous ne sommes pas propriétaires, explique Paolo Mariani, responsable de la communication de l’Eglise protestante. Mais le constat est là, nous avons moins de fidèles par tradition donc moins de moyens aussi.»
Budget déficitaire
Même son de cloche du côté catholique. «Il existe 52 paroisses à Genève. Pour l’instant, il n’y a pas de nouveaux projets de vente, explique Guylaine Antille, chargée de communication pour l’Eglise catholique de Genève. Le budget total est néanmoins déficitaire et nous comptons sur les dons d’un noyau de 15’000 donateurs fidèles.» Dans le canton de Vaud, les édifices religieux catholiques sont plus rares et les premiers datent de 1964. Aucun n’a été vendu. Mais s’il existe encore quelques résistances, la tendance générale semble indiquer que les ventes et les transformations se poursuivront... tous azimuts.