«Faites attention en sortant de l’avion, ne courez pas, respirez profondément!» Judicieux conseil de l’équipage avant de fouler le tarmac de Velasco Astete, l’aéroport de Cuzco, au sud du Pérou. Pourquoi ces précautions? Parce que l’oxygène se fait rare à 3400 mètres, et que tous les organismes ne sont pas habitués aux effets pervers du soroche (mal d’altitude) qui peuvent raccourcir le souffle et générer des céphalées. Les autochtones s’en prémunissent en chiquant des feuilles de coca. Ces possibles malaises ne devraient nullement écarter le voyageur du but ultime de tout périple péruvien: la visite de l’exceptionnel Machu Picchu, dont la ville de Cuzco, surnommée la «Rome des Incas», constitue l’antichambre.
Patrimoine mondial
Autour de cette ville se dressent encore des pans de murailles aux blocs de pierre parfaitement agencés, signature du savoir-faire inca sur lequel le conquérant espagnol a édifié ses monastères et palais coloniaux. En contemplant la belle uniformité des toitures coiffées de tuiles rousses, en pointant le regard vers l’harmonie des balcons de bois sculpté, on comprend vite pourquoi l’Unesco les a classés au Patrimoine mondial de l’Humanité. Mais d’autres merveilles attendent plus haut.
Voici donc le Machu Picchu, cité perdue dans les nuages, aussi intrigante que les pyramides égyptiennes ou les temples cambodgiens d’Angkor. Pourquoi la représente-t-on toujours dans le même axe, avec pour toile de fond le Wayna, sorte de donjon naturel en pain de sucre? Sans doute parce que c’est le cadrage le plus spectaculaire. Sur les photos du site, nulle présence humaine… en apparence, puisque jusqu’à 4000 visiteurs peuvent le fouler quotidiennement. C’est que – ramenés à l’échelle du lieu – tous ces touristes sont réduits à la taille d’insignifiants pixels. Oui, le Machu Picchu, redécouverte en 1911 par l’Américain Hiram Bingham, est gigantesque.
Les archéologues continuent de se perdre en conjectures sur la fonction réelle de cet extravagant perchoir fondé au XVe siècle par Pachacútec, neuvième empereur inca: résidence secondaire de souverain? Garnison? Sanctuaire? L’exploration du Machu Picchu fournit quelques indices sur une dévotion à la grande trilogie de la terre, de l’eau et du soleil, auquel les Incas dédiaient des cérémonies rituelles fixées par leurs excellentes connaissances astronomiques. Tintin acquiesce.