28 octobre 2070: cérémonie d’adieu...

Le septième marronnier officiel de la République sur la Treille est l’ultime arbre à avoir résisté à l’urbanisation galopante.

  • Les tours ont poussé comme des champignons sur la rive droite donnant à Genève des airs de Hongkong. PHOTOMONTAGE 123RF/GHI

Cet arbre offrait une vue imparable depuis la Treille sur les «tours testament» de l’ex-conseiller d’Etat Antonio Hodgers

En ce jour d’automne de l’année 2070, le 28 octobre exactement, et alors que GHI, dernier journal romand sur papier, s’apprête à fêter ses cent ans d’existence, a lieu sur la promenade de la Treille la cérémonie d’adieu au dernier arbre de la République.

Tous les autres, sur l’ensemble du canton, ont en effet déjà été sacrifiés pour différentes raisons qui ont pour nom la pollution automobile et industrielle, la densification ainsi que les abattages en série rendus nécessaires pour faire place aux pistes cyclables pour vélos traditionnels, à celles pour vélos électriques, les pistes pour trottinettes, de même que celles prévues pour les poussettes automatiques permettant aux nourrissons de se déplacer dans le canton sans l’aide de leur mère.

Covid-69

Si quelques voix se sont élevées contre le tronçonnage de cet ultime arbre, le marronnier officiel de Genève (le septième depuis 1818), les pressions exercées par le mouvement féministe «Ni putes, ni chiennes, ni connes, ni soumises», appelant à la destruction de ce «symbole machiste» (ceci en raison de ses glands) ont fini par convaincre une majorité d’élus. Ce qui a fait dire à certains «qu’il y a des marrons qui se perdent».

Presque tous les conseillers(ères) d’Etat, députés (ni soumises), ainsi que les représentant(e)s du Conseil administratif de la Ville et du Conseil municipal, sont présents, tous et toutes vêtus de la tenue de scaphandrier modernisée et réglementaire en ces temps de pandémie de Covid-69. Covid-69 qui, comme son nom l’indique, contraint depuis plusieurs mois les citoyens genevois à se protéger de haut en bas.

«Tours-testament» de Hodgers

Une fois l’arbre abattu, l’émotion est vive au point que des larmes se devinent sous les visières des casques. Des larmes de joie bien sûr, la disparition de cet arbre offrant une vue imparable depuis la Treille sur les huit tours de 20 étages construites quarante ans auparavant, soit juste à la fin du mandat de l’ex-conseiller d’Etat Antonio Hodgers (des «tours testament» en quelque sorte) sur le site de l’ancien parc des Bastions.

Une messe suivra d’ailleurs à la cathédrale Saint-Pierre (devenue catholique) en la mémoire du père de la densification.

Des événements qui auraient mérité qu’on s’en moque si, bien sûr, la Revue n’avait pas disparu elle aussi et depuis fort longtemps, plus précisément depuis 2021, année de sa dernière édition dans une cellule de Champ-Dollon.

105 ans du Gniolu

C’est dire qu’il ne reste pour persifler que votre serviteur dans sa chronique hebdomadaire Le Gniolu, chronique dans laquelle ce dernier se demande, en ce mois d’octobre 2070 et à quelques mois de fêter ses 105 printemps, s’il ne serait pas temps de réduire un peu sa consommation de tabac et d’alcool…